"Nazis dans le métro"

Nazis dans le métro ( dans la série "Le Poulpe" )
Didier Daeninckx

Le Poulpe
C'est un enquêteur libre, curieux, indépendant Partant de ces faits divers qui traduisent les maladies de notre monde, il explore les failles et les désordres du quotidien.
Ce n'est ni un vengeur ni le représentant d'une morale, c'est surtout un témoin de son temps.


Un type détroussé, tabassé et laissé pour mort dans le sous-sol de son immeuble parisien. Pour le quidam moyen, c'est une agression banale. Pas pour Gabriel Lecouvreur, alias le Poulpe, spécialiste des oubliés du fait divers.

La victime ? André Solga, 78 ans, anarchiste, pacifiste, ex-résistant, tendance bringueur et alcoolo. Ecrivain engagé, par-dessus le marché, qui préparait un livre sur une sombre affaire d'empoisonnement dans le marais poitevin.

Ex-dissidents déjantés, ex-Yougos massacreurs, néo-nazis. Autour de cetteaffaire gravitent quelques uns des plus fameux spécimens de têtes à claques. Il n'en faut pas plus au Poulpe pour s'échauffer sérieusement.

Un tout petit livre, que j'ai dévoré en quelques heures, et qui pour m'avoir fait grincer des dents plusieurs fois à la lecture de tous ces discours réactionnaires, négationnistes, fascistes, j'en passe et des meilleures, ne m'en a pas moins fait rire et sourire. Du très bon polar, une écriture de haute voltige, typique à Daeninckx. J'en avais déjà eu un aperçu il y a quelques années avec son Cannibale ( un roman très court sur l'expo universelle de 1931, bien flippant aussi dans le genre. Vive la France, moi je dis ), et je l'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir, cet écrivain engagé, qui mêle l'historique au populaire, le politique au quotidien, et l'humour à l'horreur.
L'intrigue est bien ficelée, mais elle n'occupe pas vraiment le premier plan : bien au delà de l'écrivain agressé, on plonge avec Gabriel dans le monde des bonesheads, des intellectuels qui ont virés de bord, d'un extrême à l'autre... On assiste à l'effilochement des frontières entre la gauche et l'extrême droite. L'Ennemi ici ne sont pas des néo-nazis à proprement parler, mais bel et bien des Steaks Saignants : National-Communistes, anciens Soviétiques/Cocos/Anars passés chez les fascistes pour assurer la pérénité de leurs idées malgré la fin de l'URSS et des révolutions un peu partout dans le monde... Mais pas seulement. Ce petit bouquin pointe aussi du doigt la facilité avec laquelle les idéaux deviennent des dogmes, et combien il est facile de passer d'un extrême à l'autre sans s'en rendre compte.
Un livre sur la mémoire, aussi, qui dénonce le négationisme, le révisionisme et autres pourritures : personne n'est épargné, de Mitterand à Le Pen, en passant par les membres de l'Académie française et surtout les professionnels du Mot. Ecrivains, journalistes, éditeurs, libraires : c'est cette branche que remonte Gabriel, et c'est à travers cette branche que l'on découvre le terrifiant pouvoir des slogans, des citations, du langage sur la mémoire.

A lire, les gens, à lire pour rire, pour frémir, et pour ne pas oublier. Et puis pour le plaisir aussi, tout simplement

C'est un des livres que j'aimerai bien que tu m'envoies quand on fera notre échange postal.

J'aime beaucoup le style de la 4ème, on ressent déjà quelque chose de spécial, de décalé. Rien que le surnom du héros et sa manière d'apparaître dans ces quelques lignes ont un style propre. J'aime bien !

Oh, et juste une remarque (qui ne s'adresse pas à toi puisque je sais que tu sais ) : les skinheads ne sont pas des néo nazis, ce sont des gens de gauche, mouvement qui a été perverti par les bonesheads, comme tu le signales, qui eux sont de dangereux psychopathes néo nazis...

Un livre qui va te plaire, je crois

Ici, j'ai volontairement employé le terme "boneheads", parce que Daeninckx ne les désigne que sous le nom de "skins" : petite justice que j'ai voulu leur rendre. Parce qu'ici, bien sûr, il n'est question que des gros-bras d'extrême droite...

Aaah, Andro de mon coeur qui veille toujours à rétablir la justice et le bon droit !